Si en 1986, Philippe Lavil prétendait qu’elle préfère l’amour en mer, le succès du film Top Gun, la même année, semble indiquer que les jeunes filles de l’époque préféraient pour atteindre le septième ciel dans leurs fantasmes s’envoyer en l’air avec un pilote que tanguer sur un bateau avec Tabarly, Pageot, Kersauson ou Riguidel…
« Take My Breathe Away »
Et c’est compréhensible, car si on en croit le Dictionnaire des fantasmes, perversions et autres pratiques de l’amour de Brenda B. Love, il y a de quoi vous faire perdre la tête de plaisir :
« Les acrobaties aériennes sont réputées procurer des sensations diverses, dues aux forces contraignant le corps au fur et à mesure des évolutions. Il se produit alors une formidable « décharge » d’adrénaline. Le sang est repoussé aux extrémités du corps, à la tête, aux pieds. Il s’ensuit une impression de flottement, d’absence, ainsi qu’un sentiment mêlé de puissance et de soumission à l’avions. Le fait d’être maintenu par un harnais de sécurité est ressenti encore plus voluptueusement que lors d’un « bondage »ordinaire. Il y a très peu de sensations comparables à celle éprouvée lorsqu’on se trouve la tête en bas, tandis que le sol approche à grande vitesse, et qu’on est déparé du monde extérieur par la transparence du cockpit. Cette situation a fait éprouver un orgasme à de nombreuses femmes. »Dictionnaire des fantasmes, perversions et autres pratiques de l’amour de Brenda B. Love
Acrophilie
Ce n’est donc pas par hasard si le premier chapitre du roman d’Emmanuelle Arsan, le classique de la littérature érotique moderne : Emmanuelle, se déroule dans un avion :
« Quasi imperceptibles, mais sans défaillances, les vibrations amorties de la coque de métal accordaient Emmanuelle à leur fréquence, cherchant des harmoniques dans les rythmes de son corps. Une onde montait le long de ses jambes, partant des genoux (épicentres chimériques de ce tremblement de sensations sans contours), résonnant inexorablement, à la surface des cuisses, toujours plus haut, secouant Emmanuelle de frissons. Désormais, les fantasmes accourraient, obsédants… »
Emmanuelle de Emmanuelle Arsan. Extrait du chapitre 1 : La licorne envolée.
Cette prédilection pour l’excitation en altitude a pour nom : l’Acrophilie. Évidement, cela englobe bien plus que la plaisir de prendre son pied en avion, l’important étant d’être en altitude ou d’en ressentir le vertige. Les possibilités de cette discipline n’ont pour limites que l’imagination et l’évolution technologique, ainsi on peut y inclure : le fait de faire l’amour lors d’un saut en parachute ou pour les plus précoces, un saut en élastique ; toute situation procurant le vertige, en haut d’une échelle, sur une poutre ou à flanc de montagne ; l’amour en apesanteur…
C’est d’ailleurs bien avant l’invention de l’avion qu’on va retrouver ce qui pourrait être le premier témoignage de copulation aérienne.
Premieres « traces » d’une copulation aérienne
Nous sommes en 1875 au Brooks’s, un des plus célèbres et anciens gentlemen’s clubs londoniens. Parmi les habitués de ce club très sélect, Lord George Cholmondeley (1er marquis de Cholmondeleyet) et lord Edward Smith-Stanley (12e comte de Derby). Sans qu’on en connaisse vraiment la raison, il est fait mention dans le livre des paris de ce club que :
« Lord Cholmondeley a donné deux guinées (NDLR : soit 42 shilling) à Lord Derby, ce dernier devant lui donner 500 guinées lorsqu’il aura eu une relation sexuelle avec une femme dans un ballon à 1000 yard d’altitude (NDLR : 915 mètres) »
Malheureusement, l’histoire ne dit pas si le pari fut gagné ou pas.
L’As de l’aviation allemande et la jolie infirmière
Il faut attendre la première guerre mondiale, pour trouver une trace probante d’un autre couple candidat au titre de « premier à s’être envoyé en l’air ». Oswald Boelcke, As de l’aviation aux 40 victoires aériennes, écrit à sa famille depuis Douai le 11 août 1915 :« Comme vous le voyez sur cette photo, je ne pilote pas qu’en temps de guerre. Le lieutenant von John, qu’on voit ici avec une blessure au genou, est venu un jour me voir avec deux infirmières de l’hôpital. Elles ne voulaient faire qu’un seul vol, alors je les ai fait monter à bord, l’une après l’autre, pour faire le tour de l’aérodrome – au grand amusement de tout l’escadron. Par contre, pour empêcher qu’une telle foule ne se forme à nouveau, le Commandant nous a interdit d’embarquer à l’avenir d’autres infirmières dans nos appareils. »Ce premier vol semble avoir fait particulièrement de l’effet à une des deux infirmières, prénommée Blanka, car celle-ci multiplie ses visites auprès d’Oswald qui, malgré l’interdiction, continue à l’emmener au septième ciel à bord de son très exigu et monoplace Fokker. Ses envolées amoureuses lui vaudront d’être sanctionné par ses supérieurs.
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