1880 : les lettres enflammées d’un prêtre pour « corrompre » les filles (19 et 13 ans) de sa maîtresse

A la fin du 19è siècle, dans un petit village des environs d'Epernay, dans la Marne, l'abbé X., curé de cette commune, entretenait des relations intimes avec Madame Z., une aubergiste déjà mûre. Mais il ne se contenta pas de ces amours surannés et essaya d'attirer à lui la fille de sa maîtresse âgée de 19 ans, et dans la seconde lettre il laisse entendre que sa  jeune sœur (13 ans, comme l'a démontré l'instruction) ne lui déplairait pas non plus.  Malheureusement pour lui, les lettres que l'abbé écrivait à cette jeune fille tombèrent entre les mains de la cabaretière, qui jalouse, indignée, n'hésita pas à transmettre cette correspondance au parquet qui, hâtons-nous de le dire, ne poursuivit pas l'homme d'église. Le fautif, protégé par le clergé, fût simplement transférer dans une autre paroisse par l'Évêque de Châlons.

C'est en lisant L'amour et le commerce sexuel  écrit en 1906 par le Dr Caufeynon (qui s'appelait en réalité Jean Fauconney, un anagramme) que nous avons trouvé ces deux lettres écrites par un prêtre à la fille ainée de sa maîtresse dans l'espoir de la corrompre sexuellement, elle et sa jeune sœur. Hixstoire a aussi retrouvé la trace de cette affaire dans le journal Justice du 12 décembre 1880 dans un article intitulé Mœurs du clergé national. Ce sont ces lettres que nous publions.

Illustration. Journal d'un curé de campagne de Robert Bresson / 1951. Inspiré du roman homonyme de Georges Bernanos, publié en 1936.

La première lettre du curé pour tenter de convaincre la fille de sa maîtresse de coucher avec lui

Bien chère amie,

Le désir que j'éprouve n'a fait qu'enflammer de plus en plus mon cœur pour vous. Oui, je vous aime et vous aimerai toujours, et mon cœur est à vous sans partage. Ne me faites plus de peine en paraissant en douter, non seulement je vous aime, mais je veux vous rendre heureuse : je sais que vous avez des désirs, je veux les satisfaire autant qu'il sera en moi.

L'amour sincère demande l'union des cœurs et des corps : Je désire donc m'unir à vous et vous devez désirer de vous unir à moi par les liens les plus forts. Quel ne serait pas notre bonheur, chère amie, si dans une étreinte amoureuse, mon cœur sur votre cœur, je vous faisais tomber dans une de ces extases dans laquelle toutes les libres du corps palpitent et tressaillent dans des jouissances qui se sentent mais qu'on ne peut exprimer.

Goûterons nous ce bonheur ? Oh oui n'est-ce pas chère amie : hâtez-vous de me le dire et de m'en donner l'occasion.

Mais en vous demandant cette faveur, je ne veux sacrifier ni votre corps, ni votre âme. Tout cela pour ne pas être une faute doit renfermer quatre conditions :

1° Se donner mutuellement son consentement;

2° Qu'il n'y ait pas œuvre de chair, c'est à dire procréation, – ce qui est facile à éviter. soyez sans inquiétude;

3° Que cela se fasse pour apaiser la concupiscence;

4° Pour raison de santé, car la privation trop longue entraîne souvent des maladies, surtout chez la femme.

Voilà l'explication vraie de ce commandement que l'on peut faire en particulier dans certains cas, mais non en public.

Maintenant, chère bien aimée, dites-moi franchement vos idées, et quelles qu'elles soient, je vous aimerai quand même. Tâchez donc de trouver et de m'assigner un jour et un lieu où nous pourrions nous voir et jouir tranquilles de tout notre bonheur. Oh ! chère ange. Je voudrais déjà t'étreindre dans mes bras et te faire palpiter sur mon cœur. Quand donc ?

Au revoir. Recevez mille baisers sur vos lèvres brûlantes et tout à vous de cœur. Ne négligez jamais de déchirer et de brûler les lettres aussitôt après lecture faite.
L'affaire a été publiée à la une du journal La Justice du 10 décembre 1880

La seconde lettre du curé dans laquelle il laisse entendre que la jeune soeur de 13 ans ne lui déplairait pas non plus

Bien chère amie,

Malgré les courses et la besogne qui m'accablent, je veux cependant vous prouver toute ma bonne volonté.

Conformez-vous aux quatre conditions que je vous ai énoncées, et soyez parfaitement en paix. Vous serez dans toutes les conditions voulues pour ne pas vous troubler.

Ne craignez pas non plus le déshonneur ; Je serai toujours assez prudent pour me retirer à temps.

D'ailleurs, la femme n'est susceptible d'être fécondée qu'au moment de ses règles et c'est pour cela qu'il faudra me tenir au courant de vos époques afin de nous abstenir.

Je puis vous fixer un jour aujourd'hui ; Je vous enverrai un livre la veille du Jour où je devrai être seul, et vous viendrez ce jour-là, de une heure à trois heures. Vous m'avez effrayé en me disant de remettre cette lettre à G…, dans un livre. Est-ce que vous lui auriez conté tout? Mais son premier soin serait de lire ce billet et il tomberait entre les mains de vos parents. Expliquez-moi donc cela au plus tôt, je suis dans l'inquiétude.

Votre sœur serait peut-être aussi désireuse de plaisir ; mais elle n'en est pas encore capable, Je suppose. Et puis, croyez-vous que l'on pourrait compter sur elle ? Expliquez-moi bien vite tout cela.

Je vous recommande surtout de ne pas conserver cette lettre, mais de la brûler aussitôt que vous l'aurez lue. Rappelez-vous bien qu'il ne faut qu'un moment pour la perdre ou la laisser voir, et nous serions à jamais compromis.

En grâce, brûlez de suite; je serai absent les trois premiers jours de la semaine, si vous pouvez venir dans les derniers, venez chercher le L , et je pourrai peut-être vous être très agréable.

Je vous embrasse des milliers de fois.

P. S. Si vous venez demain à la viande, venez me voir et apportez-moi la réponse. Cela vous était préparé pour dimanche dernier, pourquoi n'êtes-vous pas venue ?

Je n'ai jamais osé confier cela à G…

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